Une amitié aveugle

(ou la véritable histoire de “Fred is my friend”)

Mais qui est Fred ?

Fred est un condisciple de classe de Lou.

Un petit bonhomme de 17 ans qu’une maladie a profondément handicapé durant l’enfance. Devenu malvoyant, il a une santé et un corps fragiles.

Fred c'est Fred, avec ses grosses lunettes et ses yeux qui vont et viennent de manière désordonnée. Sa locution grave et difficile contraste avec sa petite taille.

Fred, c’est aussi la simplicité. Dès qu’il fait la connaissance de quelqu’un, il ne résiste pas à lui dire : « Je t’adore. Tu es dans mon cœur pour toujours ».

Est-ce son timbre de voix particulier – qui a toujours été un trait d’attirance majeur pour Lou - ou sa gentillesse simple et très similaire qui ont provoqué cette attirance ? Toujours est-il qu’une amitié est née entre les deux lascars, Lou éprouvant une profonde empathie pour Fred à la moindre situation où il sent son ami agressé par d’autres élèves de l’école.

Ainsi est né cette amitié qui, pour la première fois, s’inscrit dans le temps.

- On peut inviter Fred à la maison ?

Ce qui fut fait.

- J’ai envie de téléphoner à Fred.

Ce qui se fait occasionnellement.

- J’ai envie de composer une chanson pour Fred sur ton ordinateur, papa.

Ce qui fut fait aussi, couché sur CD et offert à son ami, mais qui n’est pas la composition avec Patrick Watson réalisée ultérieurement.

L’histoire de cette amitié n’a rien d’extraordinaire, si ce n’est qu’elle s’inscrit au delà des apparences et des performances, l’un et l’autre étant hors normes.

Ce serait banal, si elle ne marquait pas aussi un changement dans le comportement de Lou.

Jusqu’il y a seulement un an, Lou était un petit bonhomme égocentré – pas égocentrique en ce que cela implique un comportement conscient -. Sa conception du monde le mettait au centre et tout ce qui gravitait autour de lui était en quelque sorte des « hochets », des « outils » pour son bien être. Cela n’empêchait nullement l’affection voire la compassion de sa part, mais cela induisait un caractère, nous dirions, directif qui n’a d’ailleurs pas totalement disparu.

De même, les amitiés de Lou avec d’autres enfants de son âge étaient futiles et fugaces. Ses partenaires de jeu – essentiellement des jeux de rôles - se résumaient généralement au monde des adultes, plus enclins à la compréhension de son comportement, plus sécurisant aussi car conscients de devoir le surveiller et le protéger au besoin dans ses mouvements et déplacements.

Mais depuis un an et son entrée dans le secondaire et dans l’adolescence, la relation avec ses condisciples a changé, tout comme sa compréhension de la vie.

“Fred is my friend”, chanté par Patrick Watson et Lou, est donc l’expression d’une belle, très belle évolution de notre bonhomme, et d’une amitié sincère… car aveugle.