« Je n’aime pas tes paroles, je n’aime pas ta chanson !» a dit un jour un professeur de l’enseignement spécialisé à Lou 14 ans, le lendemain d’une prestation télévisée où il avait chanté « Lou, je m’appelle Lou ».
Les critiques ou des propos déplacés vis-à-vis de Lou ne datent donc pas de ses prestations à The Voice ;-)
Cela nous a permis de nous « blinder », mais surtout de réfléchir à bien des choses (objet de cette publication).
Précepte N°1 : nous pouvons ne pas aimer quelque chose, quelqu’un, une oeuvre etc. et c’est encore heureux : vive la diversité qui permet le foisonnement des idées. Nous ne vivons pas dans le monde d’Orwell.
Précepte N°2 : nous ne réagissons qu’à quelque chose qui nous a touché (d’une manière ou d’une autre). On ne réagit pas dans l’indifférence.
Précepte N°3 : si donc on réagit, c’est que cela touche à nos propres émotions. Si cette émotion est positive, nous aimerons ce ressenti. Si elle est négative, elle nous renverra vers de mauvais souvenirs, des souffrances passées… On se sentira agressé par le réveil de ces émotions. Et du coup…
Ainsi donc, réagissons-nous au quotidien. La nature humaine. Pas besoin d’être Freud ou un éminent psychologue pour comprendre ces évidences.
La vie est remplie de petites ou grosses blessures, de souffrances, d’épreuves difficiles à surmonter, et rarissimes sont les personnes qui ont vécu une vie de rêve de tous les instants. La vie est belle et, excusez du mot, salope à la fois. Tout autant qu’elle est généreuse, riche, foisonnante, incroyable (…), elle est injustice et inéquités (l’égalité est un leurre qui renvoie tout droit à un monde uniformisé et totalitaire).
Nous sommes tous des handicapés de la vie, éjectés à la naissance dans un innommable scénario à écrire, tel une roulette russe où les hasards de la vie viendront sans cesse bousculer la frêle structure que nous tentons d’écrire.
Pire, avec pour unique certitude, la fin de l’histoire. Notre condition humaine fascinante et insupportable à la fois.
Si le handicap mental ou le handicap physique sont une évidence dans les pages arrachées à notre scénario, on en oublie les handicaps sociaux et affectifs.
Et si le monde tourne comme il tourne, c’est parce qu’il est composé de milliards d’êtres blessés dans leur chair ou dans leur âme. Les handicapés sociaux et affectifs sont les blessés de l’âme. Qui, étant heureux, agresserait autrui ? Les prisons ne sont faites que de ces gens là. Le comportement boulimique, mégalomane et égoïste de Jeff Bezos (et autres pédigrees du même genre) ne sont que l’expression d’un individualisme revanchard, fruit de souffrances passées. Daesh, le conflit Israélo-palestinien et bien d’autres conflits entre peuples, ne sont qu’une succession de vengeances et revanches. Des générations marquées et incapables de pardonner les actes des générations passées, tant les blessures sont profondes. Le monde est une triste cour de récréation où « c’est l’autre qui a commencé ».
Du micro au macro. Du petit quotidien aux enjeux sociétaux et planétaires. De la poubelle agaçante que le voisin laisse traîner dans la rue à l’aigre défaite de notre club de foot favori, de la jalousie du succès de l’un au plaisir de la défaite de l’autre.
Ainsi, un professeur a craché sa frustration et ses blessures à un enfant qui ne faisait que s’exprimer dans une de ses rares excellences. C’est d’ailleurs exactement en ces termes que je lui ai répondu, entre quatre yeux, en lui demandant aussi où était son problème.
Je ne m’exprime pas ici pour faire une quelconque morale, mais juste inviter les uns et les autres à réfléchir à ces évidences, car personnellement, je ne comprends pas qu’au 21ème siècle, bien que l’humanisme ai fait des progrès colossaux en 50 ans (hélas au même titre que l’individualisme), notre humanité et sa gouvernance ne se résume pas à l’objectif fondamental et solidaire qu’est de réduire les handicaps de la vie de chacun : qu’ils soient physiques, mentaux, sociaux ou affectifs.
A ceux que la perspective d’un monde de « bisnounours » effraie, je rappellerai que l’âpreté et les accidents de la vie subsisteront et qu’il est donc impossible d’éradiquer la souffrance.
La concorde et le pardon sont les seules armes pour avancer.
La solidarité aussi.
Et le chantier planétaire est colossal, exaltant.
Aux mots « Liberté, Egalité et Fraternité », j’écrirais plutôt et dans l’ordre précis : « Fraternité, Equité et Liberté ». Fraternité dans la compréhension des difficultés de chacun, Equité qui permet à chacun d’être libre de se réaliser dans les limites de la collectivité. A ces conditions, nous pourrons être Libre.
Voilà les réflexions que m’ont amenées les critiques et les agressions (en général) sur les réseaux sociaux et ailleurs, mais surtout notre expérience avec Lou qui nous a obligé à faire table rase de tous les acquis, de toutes les logiques prédéfinies pour nous immerger dans la complexité d’expliquer le monde à un… extraterrestre.
La nécessité de revenir à des préceptes simples que la complexité du monde nous fait oublier et qu’il conviendrait de mettre au centre de toutes les préoccupations politiques.
PS :
- « ils ne savaient pas que cela était impossible, alors ils l’ont fait » (Marc Twain).
- Seule l’utopie a fait avancer le monde.
Luc Boland
« Le papa de Lou »
sur le même sujet :
- « le film de la vie » : https://www.facebook.com/luc.boland/posts/10158187905797371
Photo : Hools