mardi 9 août 2011

Etat de guerre (crise du sodium)


Pendant que la crise financière bat son plein, nous venons de vivre notre crise « à nous », une "bataille des Ardennes" : une nouvelle crise d’hyponatrémie** avec Lou.
Une autre guerre des nerfs, mais nous commençons à être blindés.
Chronique d’un combat singulier (un de plus) :

Mercredi dernier, fin de journée, Lou se paye une indigestion, enfin, pensions-nous.
Comme à chaque fois, cela le met dans un état second : somnolence jusqu’à parfois de la confusion, mal-être, inquiétude de sa part qui nécessite de le rassurer beaucoup.
Ce n’est pas le première fois. Une à deux fois par trimestre.

Le jeudi, sa santé va mieux. Il récupère.

Vendredi, fin de journée, au moment de partir pour un week-end en Ardennes, rechute.
Samedi à l’aube, premiers vomissements, puis son état se dégrade : confusion intellectuelle, maux de ventre et violents maux de têtes, montée progressive de la fièvre, jusqu’à 39,5° malgré le plan de guerre chimique déployé pour contrer l’ennemi invisible. Munitions : alternance de Perdolan et de Nurofen toutes les deux heures pour calmer l’ennemi qui s’échauffe, Motillium instant et Buscopan en batterie anti-aérienne (contre l’indigestion).  Seul le second plan marche. Son état continue de se dégrader : le front est le front, douloureusement douloureux. Il en pleure le bonhomme. S’asseoir revient à provoquer l’ennemi qui le bombarde aussi tôt d’une « blietzkrieg »*** sans pardon.

Nuit blanche. Lou dans notre lit. Le gant de toilette humide sur le front. Les gémissements du bonhomme. Ses délires. Par moment, il semble parler africain ou commencer une phrase hors propos. A d’autres moments, il nous supplie d’être le matin ou de calmer son œil qui lui fait si mal – la migraine -. La décision est prise : il est temps de faire appel à une armée professionnelle.

Dimanche matin, direction le service de garde de Bastogne. Suspicion de méningite.
Retour précipité à Bruxelles. Hospitalisation à Sainte Elisabeth, l’hôpital le plus proche de notre domicile et où Lou a déjà été hospitalisé lors d’une des deux crises majeures similaires. Diagnostic rapidement corrigé : hyponatrémie**. Conseil de transférer Lou à l’hôpital des enfants où il est habituellement suivi. Traversée de Bruxelles. Dans la voiture, Lou perd régulièrement conscience. Ambulancier dans ma jeunesse, je passe en “code 3” : feux de détresse allumés, je franchis les feux rouges au pas.
Un comité d’accueil sur place nous attend aux urgences et immédiatement, du cortisol (une autre homone suceptible d’être défaillante et de provoquer la chute du sodium dans le corps) lui est injecté.
Hospitalisation et prises de sang régulières pour mesurer son taux de sodium.
Retour à la normale progressif durant vingt-quatre heures. Lou retrouve ses esprits et fait preuve d’un courage exceptionnel, lui qui a horreur des prises de sang.
Lundi après-midi, nous pouvons quitter l’hôpital.

Hélas, ce n’est pas le manque de cortisol qui semble être en cause, mais bien l’hormone vasopressine (antidiurétique) que nous devons lui donner matin et soir pour que son corps garde l’eau, car sa posthypophyse* (sous développée) ne la produit pas (tout comme d’autres hormones déficientes que Lou doit prendre quotidiennement : mélatonine, sérotonine, hormones de croissance, médicament pour la thyroïde). A défaut de vasopressine, tout ce que Lou boit ressort aussitôt avec le danger d’une déshydratation, mais en cas d’excès de cette hormone, le sodium (sel) peut se retrouver trop dillué à cause d’un excès d’eau dans le sang, provoquant l’hyponatrémie. Le problème est que l’hormone de substitution (desmopressine) doit lui être inssufflée dans le nez à l’aide d’un petit tuyau doseur et dans des quantité infimes (0,15 ml). Au moindre rhume ou éternuement consécutif, le médicament n’agit pas correctement, le plaçant dans l’inconfort d’avoir tout le temps soif et de devoir uriner toutes les dix minutes. Bref, un manque de desmopressine provoque un inconfort et l’excès peut entraîner une trop forte rétention de l’eau qui entraîne une hyperhydratation et donc l’hoponatrémie.
Or nous n’avons rien changé aux doses prescrites... les causes de cette crise restent donc inexpliquées et il va nous falloir investiguer, car à la lumière de cet événement et au-delà des deux crises majeures, les quelques indigestions bénignes du passé pourraient bien être des mini crises d’hyponatrémie.

Quelque chose me dit que nous sommes partis pour une nouvelle batterie d’examens afin de tenter de maîtriser les risques de récidives.

Et pendant ce temps, la crise financière n’en finit pas d’alimenter la peur des lendemains, alors qu’il ne s’agit que d’un problème virtuel puisque la richesse n’est pas une valeur matérielle mais spirituelle.


* La posthypophyse est une glande du cerveau qui commande la production de toutes les hormones du corps humain. Dans le Syndrome de Morsier dont Lou est porteur, il est fréquent que la posthypophyse soit sous-développée , entrainant des insuffisances hormonales.

**L'hyponatrémie est un désordre hydro-électrolytique défini par une concentration en sodium dans le plasma sanguin (natrémie) Il en découle une hyperhydratation intracellulaire par effet osmotique (l'eau libre passe du secteur extra-cellulaire au secteur intra-cellulaire afin d'égaliser les pressions oncotiques de part et d'autre de la membrane cellulaire. Les signes cliniques ne sont pas spécifiques (nausées, vomissements, dégoût de l'eau, asthénie, céphalées, confusion), et sont souvent absents dans les hyponatrémies chroniques, surout si elles sont modérées.
La gravité des hyponatrémies est liée à la survenue d'une hypertension intra-crânienne (toujours dans les hyponatrémies d'installation rapide) responsable d'engagement avec troubles de la conscience et crises convulsives pouvant mener au décès.
Les hyponatrémies très symptomatiques (troubles de la conscience, coma, convulsions) ou complexes sont affaire de spécialistes et se traitent au mieux en réanimation médicale. Dans tous les cas, le traitement de la cause est primordial lorsqu'il est possible. Il est capital de garder à l'esprit que les hyponatrémies chroniques doivent être corrigées lentement, sous peine de myélinolyse cérébro-pontine (qui équivaut à un accident vasculaire cérébral gravissime, aboutissant fréquemment à la mort) : les neurones sont très sensibles aux variations de la natrémie. Au contraire, les hyponatrémies aiguës et mal tolérées doivent être corrigées plus rapidement (mais jamais brutalement !).
*** Blietzkrieg : guerre éclaire (terminologie utilisée durant la seconde guerre mondiale)

7 commentaires:

Tim le hu a dit…

Bien cher Lucas, merci de partager votre parcours de façon aussi claire! Cela permet de mieux vous accompagner et vous dire combien je compatis et vous accompagne (si peu) dans votre parcours. Je vous envoie du soleil de mon coeur et je fais de gros bisous à LOU.
De tout coeur
Michel Timochenkov

naomi a dit…

ik hoop dat hij snel beter wordt, en dat hij kan 'genieten' van zijn verjaardag die er bijna aankomt.
Het maakt mijn dagelijkse problemen nietig in vergelijking met jullie dagelijkse strijd. Ik wens jullie ook voor deze beproeving heel veel sterkte toe.
Liefs,
naomi

Corinne a dit…

Que dire après la lecture de cette bataille ?
Qu'effectivement, ça a l'air d'être bien parti pour une nouvelle batterie d'examens...
Qu'il faut trouver l'arme absolue pour que ces crises ne se produisent plus !
Il faut gagner cette guerre supplémentaire pendant que certains pleurent sur des richesses qu'ils ne possèdent pas.
Avec tout mon amour
Corinne

Berlebus (alias Luc Boland) a dit…

Merci Michelet Corinne, bedankt Naomi.
...et tous ceux qui ont laissé un message sur la page Facebook où je disais : ne nous plaignons pas. Il y a pire, mille fois pire, même s'il n'existe aucun hit-parade à la souffrance.
Finalement, je reste étonné par le côté zen qui nous a habité durant ces trois jours. ;-)

Berlebus (alias Luc Boland) a dit…

10-8-2011 (après-guerre + 1): Lou pète la forme, exubérant et chahuteur, comme s'il devait dépenser toute l'énergie "économisée" pendant les 72 heures de crises où il n'était plus qu'un légume. ;-)

Valérie C a dit…

Bien heureuse pour vous que Lou aille mieux, j'imagine la renaissance qui doit être celle de toute la famille après tant d'angoisses! Bon courage pour les examens médicaux!

Aude a dit…

Je me joins aux autres commantaires pour vous souhaitez bon courage dans cette nouvelle épreuve...et je suis contente d'apprendre que Lou va déjà mieux même si bien sûre des examens plus poussés sont nécessaires.
Gros bisous d'encouragement.